Débarras d’appartement : Responsabilité et cadre juridique en cas d’accident lors de l’intervention

Le débarras d’appartement est une opération courante qui intervient lors de successions, de déménagements ou de ventes immobilières. Cette tâche, apparemment simple, peut générer des situations juridiquement complexes, notamment lorsqu’un accident survient durant l’opération. Qu’il s’agisse d’un particulier faisant appel à une entreprise spécialisée ou d’un propriétaire sollicitant des proches pour l’aider, la question de la responsabilité se pose immédiatement après un incident. Le cadre légal français établit différents régimes de responsabilité selon la nature de la relation contractuelle, le statut des intervenants et les circonstances de l’accident. Comprendre ces mécanismes juridiques devient alors primordial pour déterminer qui devra supporter les conséquences financières et légales d’un dommage corporel ou matériel.

Le cadre juridique du débarras d’appartement

Le débarras d’appartement s’inscrit dans un cadre juridique précis qui varie selon la nature de la prestation et le statut des personnes impliquées. Avant d’analyser les responsabilités en cas d’accident, il convient d’identifier les différentes configurations possibles et leurs implications légales.

Lorsqu’une prestation de débarras est réalisée par une entreprise spécialisée, elle s’inscrit dans le cadre d’un contrat de prestation de services régi par les articles 1101 et suivants du Code civil. Ce contrat établit une relation commerciale formelle qui impose des obligations réciproques aux parties. L’entreprise s’engage à fournir un service conforme aux attentes du client, dans le respect des règles de l’art et des normes de sécurité applicables.

La qualification juridique précise dépend de la nature exacte de la prestation. Le débarras peut être considéré comme un contrat d’entreprise (articles 1787 à 1799-1 du Code civil) lorsqu’il implique principalement l’exécution d’un travail, ou comme un contrat de transport (articles L.133-1 et suivants du Code de commerce) lorsqu’il concerne principalement le déplacement de biens.

En revanche, lorsque le débarras est effectué à titre gracieux par des proches ou des connaissances, on se situe dans le cadre d’une entraide bénévole. Cette situation est juridiquement distincte et relève davantage de la responsabilité délictuelle que contractuelle. La Cour de cassation a eu l’occasion de préciser à plusieurs reprises les contours de cette notion, notamment dans un arrêt du 26 novembre 2003 (Civ. 1ère, n°01-17.177).

Par ailleurs, le débarras d’appartement peut impliquer des problématiques spécifiques liées à la gestion des déchets. Selon l’article L.541-2 du Code de l’environnement, tout producteur ou détenteur de déchets est tenu d’en assurer l’élimination dans des conditions respectueuses de l’environnement. Les entreprises de débarras doivent donc disposer des autorisations nécessaires pour la collecte et le traitement des déchets.

Il faut également considérer les aspects réglementaires liés à la copropriété. Le règlement de copropriété peut contenir des dispositions spécifiques concernant l’utilisation des parties communes lors d’un débarras, les horaires autorisés ou les précautions à prendre. Le non-respect de ces règles peut engager la responsabilité du propriétaire ou de l’entreprise mandatée.

  • Contrat de prestation de services pour les entreprises spécialisées
  • Entraide bénévole pour l’aide de proches
  • Respect des réglementations environnementales
  • Conformité avec le règlement de copropriété

La nature juridique de l’intervention déterminera le régime de responsabilité applicable en cas d’accident, d’où l’importance de clarifier dès le départ les conditions d’exécution de la prestation et le statut des intervenants.

Responsabilité des entreprises professionnelles de débarras

Les entreprises professionnelles de débarras sont soumises à un régime de responsabilité particulièrement encadré, qui découle à la fois de leur statut de professionnel et des obligations contractuelles qu’elles assument envers leurs clients.

En premier lieu, ces entreprises sont tenues à une obligation de sécurité qui s’applique tant à l’égard de leurs salariés que des tiers. Cette obligation trouve son fondement dans les articles L.4121-1 et suivants du Code du travail, qui imposent à l’employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Le non-respect de cette obligation peut caractériser une faute inexcusable de l’employeur, comme l’a rappelé la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 28 février 2002.

Sur le plan contractuel, l’entreprise de débarras est généralement tenue à une obligation de moyens concernant l’exécution de sa prestation. Elle doit mettre en œuvre tous les moyens nécessaires pour réaliser le débarras dans les règles de l’art, en utilisant du matériel adapté et en employant du personnel formé. Toutefois, pour certains aspects de sa prestation, notamment la sécurité des personnes, cette obligation peut se transformer en obligation de résultat, rendant sa responsabilité quasi automatique en cas de dommage.

En cas d’accident lors d’une opération de débarras, plusieurs fondements juridiques peuvent être invoqués pour engager la responsabilité de l’entreprise :

Responsabilité contractuelle

Sur le fondement des articles 1231-1 et suivants du Code civil, l’entreprise est responsable de l’inexécution ou de la mauvaise exécution de ses obligations contractuelles. Si un accident survient en raison d’un manquement à ses obligations (équipement défectueux, méthodes de travail dangereuses, absence de précautions), sa responsabilité contractuelle sera engagée vis-à-vis du client.

Responsabilité délictuelle

Vis-à-vis des tiers (voisins, passants), l’entreprise peut voir sa responsabilité délictuelle engagée sur le fondement des articles 1240 et suivants du Code civil. La jurisprudence considère que tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Responsabilité du fait des choses

L’article 1242 alinéa 1er du Code civil établit une présomption de responsabilité à l’encontre du gardien d’une chose qui a causé un dommage. L’entreprise de débarras, en tant que gardienne du matériel utilisé (monte-meubles, diables, outils), peut être tenue responsable des dommages causés par ces équipements.

Responsabilité du fait des préposés

Selon l’article 1242 alinéa 5 du Code civil, l’entreprise est responsable des dommages causés par ses salariés dans l’exercice de leurs fonctions. Cette responsabilité s’applique même si l’employeur n’a commis aucune faute personnelle, comme l’a confirmé l’arrêt Costedoat de l’Assemblée plénière du 25 février 2000.

Pour se prémunir contre ces risques, les entreprises professionnelles de débarras doivent souscrire diverses assurances obligatoires, notamment une assurance responsabilité civile professionnelle qui couvre les dommages causés aux tiers durant l’exécution de la prestation. Certaines activités spécifiques, comme le transport de biens ou la manipulation d’objets de valeur, peuvent nécessiter des garanties complémentaires.

La prévention des risques constitue également une obligation majeure. L’entreprise doit réaliser une évaluation des risques préalable à toute intervention, former ses employés aux gestes et postures adaptés, et fournir les équipements de protection individuelle nécessaires. Le document unique d’évaluation des risques (DUER) doit intégrer les risques spécifiques liés aux opérations de débarras.

Accidents impliquant des particuliers lors d’un débarras entre proches

Lorsque le débarras d’appartement est réalisé dans un cadre non professionnel, entre proches ou amis, le régime de responsabilité applicable diffère sensiblement de celui des entreprises spécialisées. Cette configuration, fréquente lors de successions ou de déménagements familiaux, soulève des questions juridiques spécifiques en cas d’accident.

Dans ce contexte, la relation entre les participants relève généralement de l’entraide bénévole, un concept juridique qui a été précisé par la jurisprudence. La Cour de cassation définit l’entraide bénévole comme une assistance spontanée, désintéressée et occasionnelle apportée à autrui. Cette qualification exclut l’existence d’un lien de subordination et donc d’un contrat de travail, même si un défraiement peut être versé pour compenser les frais engagés.

En cas d’accident survenant durant une opération de débarras entre particuliers, plusieurs fondements de responsabilité peuvent être envisagés :

Responsabilité du fait personnel

Sur le fondement de l’article 1240 du Code civil, chaque participant peut être tenu responsable des dommages qu’il cause par sa faute. Si un ami se blesse en manipulant un meuble de manière imprudente, sa propre responsabilité pourrait être engagée. Toutefois, la jurisprudence tend à apprécier plus souplement la faute dans le cadre de l’entraide bénévole, reconnaissant le caractère désintéressé de l’intervention.

Responsabilité du maître des lieux

Le propriétaire ou locataire qui sollicite l’aide de proches peut voir sa responsabilité engagée sur plusieurs fondements. D’une part, en tant que gardien des lieux, il est tenu d’une obligation de sécurité à l’égard des personnes qu’il y invite (article 1242 alinéa 1er du Code civil). D’autre part, la jurisprudence a parfois retenu une forme de responsabilité contractuelle implicite à la charge du bénéficiaire de l’entraide, qui doit assurer la sécurité de ceux qui lui apportent bénévolement leur concours.

Dans un arrêt du 21 novembre 1991 (2e Civ., n°90-15.646), la Cour de cassation a ainsi jugé que « celui qui accepte, à titre bénévole, de prêter son concours à une activité, a droit à la protection que doit lui assurer, par application de l’article 1135 du Code civil [devenu 1194], celui pour le compte duquel il exerce cette activité ».

Concernant les dommages causés aux tiers (voisins, passants), la responsabilité peut être partagée entre les différents participants à l’opération de débarras, selon leur implication dans la survenance du dommage. Le tribunal appréciera alors in concreto les circonstances de l’accident pour déterminer la contribution de chacun à la réparation.

Pour se protéger contre ces risques, plusieurs précautions s’imposent aux particuliers organisant un débarras avec l’aide de proches :

  • Vérifier que l’assurance habitation couvre les dommages causés par les personnes présentes à titre bénévole
  • Souscrire éventuellement une extension de garantie temporaire
  • Informer les participants des risques spécifiques liés à l’opération
  • Fournir si possible des équipements de protection adaptés

Il est également recommandé aux personnes qui apportent leur aide de vérifier que leur propre assurance responsabilité civile vie privée couvre bien les dommages qu’elles pourraient causer dans le cadre d’une entraide bénévole. Certains contrats excluent en effet les activités présentant un caractère professionnel, même exercées ponctuellement et sans rémunération.

La charge de la preuve joue un rôle déterminant dans ces litiges. En cas d’accident, il appartient généralement à la victime de prouver l’existence d’une faute, d’un dommage et d’un lien de causalité entre les deux. Cette preuve peut s’avérer délicate à rapporter dans le contexte informel d’un débarras entre particuliers, d’où l’importance de documenter les circonstances de l’accident (témoignages, photographies, constat amiable si possible).

Responsabilités spécifiques liées aux objets et aux lieux

Au-delà des responsabilités générales évoquées précédemment, certains aspects spécifiques liés aux objets manipulés et aux lieux du débarras méritent une attention particulière sur le plan juridique. Ces éléments peuvent en effet constituer des facteurs aggravants de responsabilité en cas d’accident.

La manipulation d’objets dangereux lors d’un débarras implique une vigilance accrue et des obligations spécifiques. Qu’il s’agisse de produits chimiques, d’objets tranchants, d’appareils électriques défectueux ou d’objets lourds, ces éléments représentent un risque particulier pour les intervenants comme pour les tiers.

Sur le plan juridique, le propriétaire de ces objets est soumis à une obligation de sécurité renforcée. L’article 1242 alinéa 1er du Code civil établit une présomption de responsabilité à l’encontre du gardien d’une chose, présomption qui ne peut être écartée que par la preuve d’une cause étrangère (force majeure, fait d’un tiers ou faute de la victime). Cette responsabilité du fait des choses s’applique indépendamment de toute faute prouvée.

La jurisprudence a précisé que la garde de la chose peut être transférée temporairement à l’entreprise de débarras si celle-ci dispose des pouvoirs d’usage, de contrôle et de direction sur l’objet. En revanche, dans le cadre d’une entraide bénévole, le transfert de garde est plus rarement reconnu, le propriétaire conservant généralement sa qualité de gardien.

Concernant les objets de valeur, une problématique spécifique se pose en termes de responsabilité. L’entreprise de débarras peut voir sa responsabilité engagée en cas de dommage causé à ces biens, sur le fondement contractuel. L’article 1197 du Code civil précise que « l’entrepreneur répond des dommages qui résultent de l’exécution du service ».

Pour les objets particulièrement précieux ou fragiles, une obligation d’information pèse sur le client. Il doit signaler à l’entreprise la présence de tels objets afin que des précautions particulières puissent être prises. À défaut, sa propre responsabilité pourrait être partiellement retenue en cas de dommage.

Configuration des lieux et responsabilité

La configuration des lieux constitue un facteur déterminant dans l’appréciation des responsabilités en cas d’accident. Des escaliers étroits, des planchers fragiles, une installation électrique défectueuse ou tout autre défaut d’entretien normal du logement peuvent être à l’origine d’accidents lors d’un débarras.

Le propriétaire ou locataire des lieux est tenu d’une obligation de sécurité fondée sur les articles 1240 et suivants du Code civil. Il doit informer les intervenants des dangers particuliers liés à la configuration des lieux. La Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler cette obligation d’information dans plusieurs arrêts, notamment en matière d’accidents domestiques.

Pour les entreprises professionnelles, une obligation de vérification préalable existe. Elles doivent s’assurer que les conditions d’intervention sont sécurisées et, le cas échéant, refuser d’intervenir ou exiger des mesures de sécurité complémentaires. Cette obligation découle du devoir de conseil inhérent à leur qualité de professionnel.

Dans les immeubles en copropriété, la responsabilité peut être partagée entre plusieurs acteurs en cas d’accident survenant dans les parties communes :

  • Le syndicat des copropriétaires, responsable de l’entretien des parties communes
  • Le copropriétaire qui a mandaté l’opération de débarras
  • L’entreprise de débarras elle-même

La jurisprudence a précisé que le syndicat des copropriétaires peut voir sa responsabilité engagée sur le fondement de l’article 14 de la loi du 10 juillet 1965, qui lui confie la conservation et l’administration des parties communes. Un défaut d’entretien de l’escalier ou de l’ascenseur ayant contribué à un accident lors d’un débarras pourrait ainsi engager sa responsabilité.

Concernant les dommages environnementaux pouvant résulter d’un débarras inapproprié (déversement de produits toxiques, abandon de déchets), la responsabilité peut être engagée sur le fondement de l’article L.541-3 du Code de l’environnement. Le maire peut notamment mettre en demeure le responsable d’effectuer les opérations nécessaires au respect de la réglementation, sous peine d’astreinte.

Pour limiter ces risques spécifiques, plusieurs mesures préventives peuvent être mises en œuvre :

Pour les entreprises professionnelles : réaliser une visite préalable des lieux, établir un inventaire détaillé des objets de valeur, prévoir des équipements adaptés à la configuration des lieux (monte-charges, protections des sols et murs).

Pour les particuliers : sécuriser les zones dangereuses, signaler clairement les objets fragiles ou dangereux, vérifier la solidité des planchers et escaliers avant l’intervention.

Procédures et recours en cas d’accident lors d’un débarras

Lorsqu’un accident survient pendant une opération de débarras d’appartement, plusieurs démarches doivent être entreprises rapidement pour préserver les droits des victimes et clarifier les responsabilités. Ces procédures varient selon la gravité de l’accident et le statut des personnes impliquées.

La première étape consiste à prendre les mesures d’urgence nécessaires : secourir la victime, contacter les services d’urgence si nécessaire, et sécuriser les lieux pour éviter tout accident secondaire. Ces actions immédiates ont non seulement une importance pratique mais aussi juridique, car l’absence de secours pourrait être interprétée comme une négligence aggravant la responsabilité.

Il est ensuite primordial de documenter les circonstances de l’accident. Cette documentation servira de base aux éventuelles procédures ultérieures :

  • Recueillir les témoignages des personnes présentes
  • Photographier les lieux et les éventuels éléments ayant contribué à l’accident
  • Conserver les preuves matérielles (objet défectueux, équipement impliqué)
  • Rédiger un compte-rendu détaillé de l’incident

Démarches assurantielles

La déclaration à l’assurance constitue une étape fondamentale. Selon l’article L.113-2 du Code des assurances, l’assuré doit déclarer le sinistre à son assureur dans un délai maximum fixé par le contrat, généralement de 5 jours ouvrés. Cette déclaration doit être effectuée par la personne dont la responsabilité pourrait être engagée.

Plusieurs polices d’assurance peuvent être mobilisées selon les circonstances :

Pour les accidents impliquant une entreprise professionnelle : l’assurance responsabilité civile professionnelle de l’entreprise, complétée éventuellement par des garanties spécifiques (dommages aux biens confiés, transport de marchandises).

Pour les accidents entre particuliers : l’assurance multirisque habitation du propriétaire des lieux, qui comporte généralement un volet responsabilité civile couvrant les dommages causés aux tiers dans le logement.

Pour les dommages corporels subis par un intervenant bénévole : sa propre assurance individuelle accident ou, dans certains cas, l’assurance du propriétaire si sa responsabilité est établie.

L’intervention des assurances peut donner lieu à une expertise contradictoire visant à déterminer les causes exactes de l’accident et à évaluer l’étendue des dommages. Les victimes ont intérêt à se faire assister lors de cette expertise, soit par leur propre expert d’assuré, soit par un avocat spécialisé.

Voies de recours judiciaires

Si la phase amiable n’aboutit pas à une indemnisation satisfaisante, plusieurs voies de recours judiciaires s’offrent aux victimes :

La procédure civile vise à obtenir réparation du préjudice subi. Selon l’importance du litige, elle relèvera de la compétence du tribunal judiciaire (pour les demandes supérieures à 10 000 euros) ou du tribunal de proximité (pour les demandes inférieures). Le délai de prescription de droit commun est de 5 ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation, conformément à l’article 2224 du Code civil.

La victime devra démontrer l’existence d’une faute (contractuelle ou délictuelle selon les cas), d’un préjudice et d’un lien de causalité entre les deux. Dans certaines hypothèses, notamment en cas de responsabilité du fait des choses, la faute est présumée, allégeant la charge de la preuve pour la victime.

En cas de blessure grave ou d’incapacité permanente résultant de l’accident, une expertise médicale judiciaire pourra être ordonnée pour évaluer précisément le préjudice corporel selon la nomenclature Dintilhac, qui distingue différents postes de préjudice (souffrances endurées, préjudice esthétique, préjudice d’agrément, etc.).

Parallèlement à l’action civile, une procédure pénale peut être engagée si l’accident résulte d’une infraction. Les qualifications pénales envisageables dépendent de la gravité des blessures et des circonstances :

Blessures involontaires avec incapacité totale de travail inférieure ou égale à 3 mois (contravention de 5ème classe, article R.625-2 du Code pénal)

Blessures involontaires avec incapacité totale de travail supérieure à 3 mois (délit, article 222-19 du Code pénal)

Ces infractions peuvent être aggravées en cas de manquement délibéré à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement.

La victime peut porter plainte auprès du commissariat, de la gendarmerie ou directement auprès du procureur de la République. Elle peut également se constituer partie civile, soit par intervention à une procédure pénale déjà engagée, soit par voie de citation directe, soit par plainte avec constitution de partie civile devant le juge d’instruction.

Cas particulier des accidents du travail

Lorsque l’accident touche un salarié d’une entreprise de débarras, il relève du régime des accidents du travail prévu par le Code de la sécurité sociale. L’employeur doit alors effectuer une déclaration d’accident du travail dans les 48 heures auprès de la caisse primaire d’assurance maladie.

Le salarié bénéficie d’une présomption d’imputabilité de l’accident au travail dès lors qu’il survient par le fait ou à l’occasion du travail, quelle qu’en soit la cause. Cette présomption ne peut être renversée que si l’employeur ou la caisse prouve que l’accident est totalement étranger au travail.

En cas de faute inexcusable de l’employeur, caractérisée par la conscience du danger et l’absence de mesures nécessaires pour en préserver le salarié, ce dernier peut obtenir une majoration de sa rente d’incapacité et l’indemnisation de préjudices complémentaires. La jurisprudence a considérablement élargi la notion de faute inexcusable depuis les arrêts amiante du 28 février 2002, facilitant l’indemnisation des victimes.

Pour les travailleurs indépendants réalisant des prestations de débarras, la protection est généralement moindre, sauf souscription volontaire à une assurance accidents du travail. Ils peuvent néanmoins engager la responsabilité du client sur le fondement du droit commun en cas de manquement à la sécurité imputable à ce dernier.

Stratégies de prévention et bonnes pratiques juridiques

La meilleure façon de gérer les accidents lors d’opérations de débarras reste la prévention. Au-delà des aspects purement techniques, une approche juridique préventive permet de limiter considérablement les risques et de clarifier les responsabilités en amont.

La formalisation des relations contractuelles constitue la première ligne de défense contre les litiges potentiels. Que l’on fasse appel à une entreprise professionnelle ou à des proches, il est recommandé d’établir un document écrit précisant les conditions de l’intervention.

Pour les prestations professionnelles, un contrat détaillé doit être établi conformément aux exigences du Code de la consommation. Ce contrat doit notamment préciser :

  • Le périmètre exact de la prestation
  • Les obligations respectives des parties
  • Les mesures de sécurité applicables
  • Les assurances souscrites par l’entreprise
  • Les modalités de règlement des litiges

L’article L.111-1 du Code de la consommation impose au professionnel une obligation d’information précontractuelle portant notamment sur les caractéristiques essentielles du service. Cette information doit inclure les risques potentiels liés à l’opération de débarras et les précautions à prendre.

Pour l’entraide bénévole, bien que moins formalisée, il est judicieux d’établir un écrit simple précisant la nature de l’aide apportée et rappelant les précautions de sécurité. Ce document n’a pas vocation à créer des obligations contractuelles strictes mais peut servir de preuve en cas de litige ultérieur.

Vérifications préalables et état des lieux

Avant toute opération de débarras, plusieurs vérifications s’imposent pour prévenir les accidents et clarifier les responsabilités :

La réalisation d’un état des lieux contradictoire avant et après l’intervention permet d’identifier d’éventuels dommages préexistants et de documenter ceux qui pourraient survenir pendant l’opération. Cet état des lieux devrait idéalement être accompagné de photographies datées.

L’inventaire des objets à débarrasser, particulièrement ceux présentant une valeur ou un danger spécifique, constitue une précaution utile. Cet inventaire peut être annexé au contrat ou à l’accord verbal de débarras.

La vérification des assurances de chaque intervenant est fondamentale. Pour une entreprise professionnelle, le client est en droit d’exiger une attestation d’assurance responsabilité civile professionnelle en cours de validité. Pour les particuliers, il convient de s’assurer que leur assurance habitation ou responsabilité civile couvre bien ce type d’activité.

Mesures de sécurité spécifiques

Certaines mesures de sécurité ont une portée juridique particulière en ce qu’elles peuvent constituer des éléments déterminants dans l’appréciation des responsabilités :

La fourniture d’équipements de protection individuelle (gants, chaussures de sécurité, casques) aux intervenants, même bénévoles, témoigne d’une diligence qui pourra être valorisée en cas de litige. L’article R.4321-4 du Code du travail impose cette obligation aux employeurs, mais elle peut être étendue par analogie au cadre de l’entraide bénévole.

L’information sur les risques spécifiques liés à l’opération de débarras doit être formalisée. Pour les entreprises professionnelles, cette obligation découle directement de leur devoir de conseil. Pour les particuliers faisant appel à des proches, elle relève du devoir général de prudence.

La planification des opérations constitue également un élément de prévention juridiquement valorisable. Un plan de débarras identifiant les étapes critiques, les zones à risque et les précautions particulières démontre une approche méthodique susceptible d’écarter ou de limiter la responsabilité en cas d’accident.

Gestion et traçabilité des déchets

La gestion des déchets issus du débarras présente des enjeux juridiques spécifiques qui méritent une attention particulière :

Les bordereaux de suivi des déchets sont obligatoires pour certaines catégories de déchets dangereux (article R.541-45 du Code de l’environnement). Leur conservation permet de prouver que l’élimination a été effectuée conformément à la réglementation.

L’utilisation de filières agréées pour l’élimination des déchets constitue une obligation légale dont le non-respect peut entraîner des sanctions administratives et pénales. L’article L.541-46 du Code de l’environnement punit de deux ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende le fait de remettre des déchets à une personne non autorisée.

La traçabilité des objets de valeur débarrassés revêt une importance particulière en cas de contestation ultérieure. Un inventaire signé des objets conservés, donnés ou mis au rebut peut prévenir des litiges, notamment dans le cadre de successions.

En matière de prévention des accidents lors d’un débarras, la jurisprudence tend à valoriser l’approche proactive des parties. Dans un arrêt du 16 janvier 2014 (2e Civ., n°13-10.566), la Cour de cassation a ainsi considéré que l’absence de mesures préventives élémentaires constituait une négligence fautive de nature à engager la responsabilité du propriétaire des lieux.

L’anticipation des difficultés potentielles, la formalisation des accords et la mise en œuvre de mesures de sécurité adaptées constituent donc non seulement des bonnes pratiques opérationnelles, mais aussi des précautions juridiques susceptibles de limiter significativement les risques de mise en cause en cas d’accident.

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*